La phrase

  1. Généralités.

     Cette page est consacrée à l'utilisation des règles qui ont déjà été énoncées. On s'intéresse ici plus au sens et à l'emploi des mots qu'à la grammaire elle-même.

  2. Le pronom réfléchi et le pronom possessif réfléchi.

     Comme il a déjà été dit, ils s'emploient d'une manière un peu différente du français. Les réfléchis s'emploient quelle que soit la personne du sujet, et il ne s'accorde qu'en nombre.

    U s'udugu : Je m'entends.
    Vo sos uduz : Vous vous entendez.
    Udugu ì get dy si : J'entends mon chat.
    Udugu ì siu : J'entends le mien.

     Si et sis s'emploient aussi comme sujets de propositions subordonnées pour indiquer que le sujet est le même que celui de la proposition principale. L'emploi du réfléchi est donc plus important et fréquent qu'en français.

  3. L'emploi des semi-auxiliaires.

    1. les différentes constructions.

       Comme leur nom l'indique, les semi-auxiliaires peuvent être employés :

      • comme des verbes à part entière,
      • comme des auxiliaires du même type qu'esi.

       Comme verbes à part entière, ils peuvent être employés seuls ou avec un complément direct.

      Pe : Il peut.
      Veh get : Tu veux un chat.
      Eh voli get : Tu veux un chat maintenant.
      O seper : On le sait ("Ca est su").

       Ils sont beaucoup plus riches en tant qu'auxiliaires, c'est-à-dire suivis d'un verbe. Ils ont dans ce cas deux constructions différentes :

      • auxiliaire + substantif verbal + compléments éventuels.
        C'est la même construction qu'en français où les sujets des deux verbes sont confondus. Comme avec esi, le substantif verbal n'est pas précédé de l'article. Cette construction n'est possible que si le verbe à mettre au substantif verbal n'est pas complété par un complémentatif et que tous les compléments en dépendant sont des substantifs (pas de verbe ni de proposition). Ce substantif verbal doit toujours exister (on ne peut pas employer de proposition nominale). Dans les cas où ces conditions ne sont pas respectées, on utilise la seconde construction.

        Volu uduri ì get ic : Je veux entendre ce chat-ci.

      • auxiliaire + proposition subordonnée.
        L'auxiliaire est alors suivi d'une proposition subordonnée non introduite par une particule. Alors, par exception, le sujet obligatoire de la subordonnée est un complément direct. L'utilisation des temps se fait cependant comme dans toute subordonnée. On emploie l'indicatif lorsque le fait relaté est certain, le subjonctif lorsqu'il y a un doute. Cette construction s'emploie dans tous les cas où la première construction est impossible, entre autres quand les deux sujets sont différents.

        Sepu h'o-lhe : Je sais qu'elle l'a lu.

    2. le sens des différents semi-auxiliaires.
      Posi pouvoir, avoir la capacité actuelle de*
      avoir le droit de
      supposition ("il se peut que")
      Sepi savoir, savoir faire, avoir la capacité théorique de*
      connaître**
      Voli vouloir (fermement***)
      futur proche (aller + infinitif)
      Debi devoir, être obligé de (nécessité)
      devoir (obligation morale)
      probabilité ou déduction ("devoir")
      * "avoir la capacité de" se rend par posi lorsque cette capacité est immédiate, lorsque toutes les conditions sont réunies pour accomplir l'action. Lorsque cette capacité est seulement théorique et que l'action est pratiquement impossible à réliser (mais peut-être le sera-t-elle à un autre moment ?), on utilise sepi.

      Posu nadri : Je peux nager (maintenant, parce que je sais nager et que je suis sur une plage ou au bord d'une piscine).
      Sepu nadri : Je sais nager (j'ai appris à nager, mais je suis actuellement dans l'incapacité pratique de la faire).

      ** ne s'emploie dans ce sens que comme verbe à part entière.
      *** voli ne peut se traduire par "avoir envie de" que s'il est employé au subjonctif, l'incertitude du subjonctif contrebalançant la fermeté de la volonté.

      u voli : "je voudrais" ou "j'ai envie de".

  4. L'ellipse.

     C'est l'omission de mots normalement grammaticalement nécessaires mais en fait totalement inutiles (et même parfois néfastes) pour la compréhension qui prime sur toute règle de grammaire.

     Ainsi, le vocatif n'est rien d'autre que l'ellipse de l'article dont le sens est pris en charge par l'exclamation. De même, l'expression de l'heure contient l'ellipse de d'ì devant le pronom cardinal de l'heure lorsque celle-ci n'est pas pile. Une manière grammaticalement correcte de dire "à neuf heures douze" serait par exemple : ad'ì dezi d'ì nevi, mais elle n'est jamais employée. Au contraire, l'ellipse de l'article devant l'année dans l'expression de la date est peu usitée, et est généralement accompagnée de l'ellipse des milliers et des centaines :

    ad'ì denteqinme ì mersa sitentese : le 25 mars 76.

    L'ellipse du pronom o ou uc comme sujet impersonnel ("ce" ou "il" français) d'une phrase nominale ou d'une subordonnée est aussi très fréquente, mais ce à un niveau de langue courant ou même familier.

     Un dernier type d'ellipse est très courant (et même quasiment obligatoire), dans tous les registres de langue. C'est l'ellipse d'un nom (et de son article) employé plusieurs fois dans des constructions similaires.
    vir ben e bel : un homme bon et beau (ellipse de vir après e, bien que ce soit une particule normalement toujours suivie d'un nom. Cette ellipse est obligatoire car elle permet de ne pas confondre avec vir ben e vir bel où les deux hommes sont différents).
    Ì get dy mi plu bel kom ì Marhah : Mon chat est plus beau que celui de Marie (la suppression de ì get après kom n'entraîne pas de confusion puisque le nom propre est au génitif).

  5. Le discours indirect.

     La principale particularité du discours indirect est de ne pas obéir à la concordance des temps comme en français. Lors du passage au discours indirect, le temps des verbes reste le même, sauf l'impératif qui devient un subjonctif présent ou futur selon le sens. Quant à l'indicatif, on peut le transformer en subjonctif pour signifier qu'on prend parti pour les paroles dites. On emploie le style indirect avec des verbes comme :

    loquri, inquri, ahri : dire, affirmer.
    piteri, rugeri : demander.
    jysiri : ordonner.

    Ahri est un verbe consonnant (et non pas iota) qui signifie "affirmer" au discours indirect. En proposition incise dans le discours direct, il signifie plutôt "dire". Quant à inquri, on l'emploie peu en avec le discours indirect et surtout dans le discours direct.

     La transformation des propositions du discours direct en propositions subordonnées du discours indirect se fait comme suit :
    Discours direct Discours indirect
    propositions affirmatives et négatives subordonnées introduites par qe
    interrogatives avec mot interrogatif subordonnées introduites par qe*
    interrogatives sans mot interrogatif subordonnées introduites par nu (n' devant voyelle)
    impératives subordonnées au subjonctif introduites par qe
    * dans les subordnonnées interrogatives indirectes avec mot interrogatif, celui-ci garde sa nature nominale ou complémentative. C'est pourquoi ces subordonnées se construisent comme des phrases affirmatives ou négatives.

    "Iru kre" : "J'irai demain."
    Loqwe qe sh'ire kre : Il a dit qu'il irait demain.
    Ahe qe sh'iture kre : Il a affirmé qu'il irait demain (et j'ai confiance en lui).
    Loqwis qe sh'iri kre : Tu as dit que tu irais demain (remarquez l'emploi du réfléchi).

  6. La formation de mots dérivés.

     Il n'y a pas vraiment de dérivation productive en Réman (c'est-à-dire de dérivation comme on peut trouver en Espéranto). Il y a pourtant quelques schémas récurrents qui se dégagent. Il faut cependant bien se rappeler que ce qui est présenté ici ne doit jamais être généralisé abusivement.

    1. les noms de pays et leurs dérivés.

       Ce sont les noms de pays, de langues, d'habitants et les complémentatifs de nationalité.

      t'Ispanhe : l'Espagne.
      spanhol : espagnol (langue ou habitants).
      ì Franci : la France.
      francis : français.

      Il faut remarquer que comme en français, seuls les noms de pays prennent la majuscule.

       Généralement, la forme des différents termes de nationalité est imprévisible. Il existe cependant un schéma qu'on retrouve pour certains pays, la plupart se terminant en -ie en français :

      • nom du pays : racine + -eh,
      • nom de la langue : racine seule,
      • nom et complémentatif des habitants : soit le nom du pays, soit le nom de la langue, mais jamais les deux. On ne peut prévoir lequel sera préféré. Si le nom du pays est utilisé, le pluriel est alors irrégulier en -eis.

      ì Rumaneh : la Roumanie.
      ì ruman : la langue roumaine.
      ruman, ì rumane : un roumain, les roumains.
      t'Italeh : l'Italie.
      t'ital  l'italien.
      italeh, t'italeis : un italien, les italiens.

       Pour parler d'un peuple en général, on utilise le pluriel indéfini.

      italeis : les italiens (en général), le peuple italien.

    2. les substantifs d'action.

       Ce sont des substantifs dérivés de verbes d'action, ayant le même sens que le substantif verbal actif, mais dénombrables. Ils se forment sur le radical du verbe (parfois modifié) auquel on ajoute le suffixe -cho ou -sho (non accentués). Le choix de l'un ou l'autre de ces suffixes ne dépend pas d'une règle interne mais on peut faire une comparaison avec le français. Ces substantifs correspondent généralement à des substantifs en -tion ou en -sion en français. On emploie alors -cho quand on emploie /sjõ/ (-tion ou -ssion) en français et -sho quand on emploie /zjõ/ (-sion), mais ce n'est pas obligatoire.

      veri : voir -> ì visho : la vision.
      trensporteri : transporter -> ì trensportecho : le transport.

       Il existe bien entendu d'autres formations de substantifs d'action :

      vendri : vendre -> ì venti : la vente.
      trensferi : transférer, transporter -> ì trensferti : le transfert, le transport.

    3. les diminutifs et augmentatifs.

       Ils font partie des rares suffixes utilisés de façon assez extensive et sont employés non pas simplement pour décrire quelque chose (les complémentatifs y arrivent très bien), mais pour y ajouter un jugement de valeur ou affectif. Quand on les utilise, il est impossible de prévoir si l'accent tonique sera modifié ou pas. Il suit cependant souvent les règles déjà énoncées.

       Ainsi, les suffixes diminutifs sont -it et -in. -in souligne plus la petitesse (avec une nuance de fragilité et/ou de pitié) que -it qui évoque plutôt la tendresse.

      vir : homme -> virit : un petit homme (pour décrire un petit garçon).
      ì sur : la soeur ->ì surit dy mi : ma petite soeur.
      parvi : petit -> parvin : tout petit.
      ì virin ic : ce pauvre petit homme.

       Les augmentatifs sont -on et -ot. -on indique la simple grandeur tandis que -ot marque l'excès. Par conséquent, -on est plutôt laudatif tandis que -ot est péjoratif.

      viron : un grand homme, un gaillard.
      ì frete : le frère -> ì freton dy ti : ton grand frère.
      alt : grand (personne) -> altot : trop grand (employé comme substantif dans le sens de "échalas").
      mut : un mot -> mutot : un gros mot, un juron.


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