La particule
Tout comme le complémentatif, la particule est totalement invariable. Cependant, elle se modifie souvent selon qu'elle est suivie d'une voyelle ou d'une consonne (apocope ou liaison). On l'utilise avec un substantif. Si celui-ci est un pronom personnel, on utilise les pronoms indirects. Rien ne peut séparer la particule du substantif, sauf l'article. On peut placer normalement la particule devant ou derrière le subtantif qu'elle complète, mais comme les particules dérivent des prépositions et conjonctions latines, on les place par habitude devant le substantif. La particule a ici le sens des prépositions (parfois des conjonctions de coordination). Il existe alors une construction inconnue des langues romanes mais qui existe en arabe : on peut compléter le substantif avec un verbe conjugué ayant ce nom pour sujet. Le verbe peut être complété par d'autres compléments. Le substantif devient alors sujet du verbe (tout en restant indirect s'il s'agit d'un pronom personnel) et la particule prend le sens d'une conjonction (de coordination ou de subordination). La proposition subordonnée peut être nominale, auquel cas on emploie souvent un adverbe de temps, même au présent. Certaines particules ne s'emploient que comme conjonctions, mais elles conservent tout de même cette construction. On peut employer des verbes au substantif verbal avec des particules, mais le verbe doit toujours être défini.
Elles permettent de répondre aux questions sur le lieu, et on peut les compléter avec des complémentatifs pour préciser leur sens. Les plus utilisées sont :
in | : à (question ovi) | a (ad' devant voyelle) | : à (question qu) | e (es' devant voyelle) | : de (question und) |
per | : par (question qwa) | pre | : devant (questions ovi et qu) | pos | : derrière (questions ovi et qu) |
su (sw' devant voyelle) | : sous, au-dessous de (questions ovi et qu) | syr | : sur, au-dessus de (questions ovi et qu) | enter | : entre, parmi (questions ovi et qu) |
Pour répondre aux questions und et qwa avec pre, pos, su, syr et enter, on les précède de e ou per.
Il existe des complémentatifs pouvant nuancer le sens de ces particules. On les place en opposition avec le substantif (devant la particule si elle est devant le substantif, derrière sinon) même si ce n'est pas obligatoire. Ces complémentatifs ont la propriété de souvent s'apocoper si la particule qui les suit commence par une voyelle.
prupi (prup' devant voyelle) | : près | prequ (preq' devant voyelle) | : loin |
entra (entr' devant voyelle) | : dans, à l'intérieur | estra (estr' devant voyelle) | : hors, à l'extérieur |
cerk | : autour, à côté | jem | : depuis, à partir |
usqu (usq' devant voyelle) | : jusque | ver | : vers, en direction |
Il ne faut pas oublier qu'il s'agit de vrais complémentatifs qui peuvent donc s'employer comme adjectifs ou adverbes. Mais dans ce cas-là, ils ne s'apocopent normalement pas (en fait si, mais uniquement en langage familier).
Elles fonctionnent comme les particules de lieu et les mêmes complémentatifs peuvent les nuancer. Deux d'entre elles sont d'ailleurs des particules de lieu dont le sens s'est élargi au temps.
a (ad' devant voyelle) | : à (question qen) | per | : pendant (question quntudho) |
ant | : avant | prus | : après |
en | : en (temps employé - moyen -) |
Elles permettent de former des compléments non circonstanciels qui sont : le complément d'attribution, le complément du nom et le complément d'agent.
Il se forme avec la particule a (ad' devant voyelle) : à et indique géralement à qui on donne (ou on prend) une chose indiquée par le complément direct.
O-de ad'i : Il le lui donne.
Degi sykur a mi : Tu me donnes du sucre.
Il se forme avec la particule dy (d' devant voyelle) : de. Comme on l'a vu dans la paragraphe consacré au génitif, il s'emploie dans les mêmes cas que le génitif, lorsqu'on ne peut employer ce dernier. En particulier, il sert à former l'équivalent des adjectifs possessifs :
ì get dy mi : mon chat.
Il se forme lui aussi avec la particule a (ad') qui a cette fois le sens de "par" et s'emploie avec le passif personnel pour indiquer l'auteur de l'action.
Uct vendede ad'i : Ca a été vendu par lui.
Contrairement au français, il n'existe pas en Réman de mot coordonnant deux entités de même nature (complémentatif et complémentatif, substantif et substantif, proposition et proposition, etc...). On utilise dans ce cas des particules, et grammaticalement on a des compléments ou des propositions subordonnées. Ces particules peuvent exprimer :
e (es' devant voyelle) | : et |
ak | : et (plus littéraire) |
n'e, n'ak | : et... ne... pas, ni |
vir ben e vir bel : un homme bon et beau (ou bien : un homme bon et un homme beau).
ot | : ou (lorsque les termes s'excluent) |
we (w' devant voyelle) | : ou bien (lors d'un choix) |
sid | : mais |
a (ad' devant voyelle) | : mais, et pourtant (plus fort) |
nem | : car |
enem | : en effet |
pos | : donc |
irgu | : donc, aussi, par conséquent |
L'emploi de la particule en est une des difficultés du Réman, car sa ressemblance avec le "en" français (qui n'a pas du tout le même sens) peut porter à confusion. en s'emploie pour désigner le moyen de l'action et uniquement dans ce sens. Il convient donc de ne pas confondre le moyen avec par exemple la manière (ce qui se fait souvent en français). Ce moyen peut d'ailleurs être un instrument, ce qui signifie que la traduction la plus fréquente de en est "avec". On peut aussi l'employer avec le nom verbal défini pour former une structure qu'on appelle gérondif (et qu'on traduit souvent par "en + participe présent") mais qui ne concurrence pas la structure résultative car son emploi se limite là encore à l'expression du moyen. Un exemple aidera certainement à comprendre l'emploi de cette particule :
En ì vendri sykur, pofwi pehri a si awto : En vendant du sucre, j'ai pu me payer une voiture (je sais, l'exemple n'est pas génial...).
Le fait de vendre du sucre, dans ce cas, est considéré purement et simplement comme un moyen de s'acheter une voiture, un instrument pour réliser un souhait.
Le vocatif n'est pas un cas du nom, et il est traité ici car il n'est que rarement employé sans particule. Le vocatif consiste pour les substantifs à ne pas utiliser l'article et pour les pronoms personnels à utiliser les formes indirectes. Il s'emploie pour appeler ou interpeler quelqu'un et est presque toujours accompagné de la particule pro (qu'on pourraît traduire par ô, mais qui n'a pas sa nuance grandiloquente et qui est plutôt la règle que l'exception). Seuls les noms très longs sont moins employés avec pro.
Pro ti ! : (Eh !) toi !
Pro Juhen ! : Jean !
Kristuforuh ! : Christophe !
Il existe d'autres particules qui ont un sens proche du vocatif mais qui s'emploient avec un substantif normal, avec ou sans article. Ce sont :
icek : voici, voici que
ictek : voilà, voilà que
ilek : voilà... là-bas, voilà que... là-bas
Les propositions subordonnées conditionnelles se forment avec la particule se (s' devant voyelle) : si, que l'on peut compléter (entre autres) par na, formant ainsi na se (na s') : si... ne... pas, à moins que. Les temps dans la principale et la subordonnée donnent le degré d'hypothèse. Les combinaisons généralement employées ont des sens proches du français, et certaines (comme se + indicatif présent, principale à l'indicatif présent ou futur) sont identiques à leurs équivalents français. Comme il n'existe pas de conditionnel en Réman, le potentiel et les irréels sont rendus par :
Français | Réman | |
---|---|---|
Potentiel | si + indicatif imparfait, principale au conditionnel présent | se + subjonctif présent, principale au subjonctif futur |
Irréel du présent | si + indicatif imparfait, principale au conditionnel présent | se + subjonctif présent, principale au subjonctif présent |
Irréel du passé | si + indicatif plus-que-parfait, principale au conditionnel passé | se + subjonctif présent, principale au subjonctif passé |
La différence entre le potentiel et l'irréel du présent est que dans le potentiel, l'action est toujours possible dans l'avenir.
Se si posi, ituru : Si je pouvais, j'irais (je ne peux pas maintenant mais je pourrai certainement plus tard).
Se si posi, u e : Si je pouvais, j'irais (mais je ne peux pas).
Bien entendu, il peut y avoir des écarts à ce schéma comme l'emploi de l'impératif dans la principale.
Remarque : se s'emploie aussi pour indiquer l'accompagnement (avec) et na se a dans ce cas le sens de "sans". Ils ne s'emploient jamais avec le sens instrumental de "avec" (qui est pris en charge par en).
La particule qe (q' devant voyelle) : que ne sert qu'à former des propositions subordonnées. On l'emploie seule avec certains verbes pour former des complétives, ou précédée de complémentatifs, particules ou compléments pour en faire des conjonctions. Par exemple :
qen qe : quand (conjonction de subordination).
kur qe : parce que.
usqu qe : jusquà ce que.
Comme on l'a vu tout au long de cette page, certaines particules ont plusieurs sens (parfois non reliés entre eux). Ceci est dû principalement à la fusion de différentes prépositions et conjonctions qui sont devenus identiques au fur et à mesure de l'histoire du Réman. Ainsi, on a :
e (es' devant voyelle) | de (question und) |
---|---|
et (conjonction de coordination) | |
se (s' devant voyelle)* | si (conjonction de subordination) |
avec (préposition) | |
na se (na s' devant voyelle)* | si... ne... pas, à moins que |
sans (préposition) | |
pos | derrière (préposition) |
donc (conjonction de coordination) | |
per | par (question qwa) |
pendant (question quntudho) |
Mais la palme revient sans conteste à a :
a (ad' devant voyelle) | à (question qu) |
---|---|
à (question qen) | |
à (complément d'attribution) | |
par (complément d'agent) | |
mais, et pourtant | |
pour (but) |